You are here
La  Loi du Cadenas : Une atteinte à la liberté d’expression Law 

La Loi du Cadenas : Une atteinte à la liberté d’expression

La Cour Suprême du Canada, à maintes reprises, a protégé les droits fondamentaux des Canadiens. Une instance où la Cour a critiqué une loi qui avait comme but l’élimination de la dissidence politique peut être observée lors de l’affaire Switzman c. Elbling et le Procureur-Général de la Province de Québec (1957). 

Freda Elbling était une propriétaire d’un appartement qu’elle louait à Max Bailey. Bailey a transféré le contrat à John Switzman, avec l’accord d’Elbling. Un jour, Elbling a informé Switzman qu’elle allait le poursuivre en justice car en amenant des communistes dans sa demeure il violait certaines sections de la Loi du Cadenas

La Loi du Cadenas, adoptée par l’Assemblée Législative du Québec en 1937 sous la gouvernance de Maurice Duplessis, était intitulée « Loi protégeant la province contre la propagande communiste ». Cette loi rendait toute publication ou expression favorable envers l’idéologie communiste illégale. L’article 3 de cette loi rendait l’action d’utiliser une maison, un bâtiment ou toute autre construction pour la diffusion de l’idéologie communiste ou bolchévique illégale. Une violation de l’article 3 donnait la permission au procureur-général qui était Maurice Duplessis de fermer le bâtiment et si la fermeture de ce bâtiment n’était pas respectée, le bâtiment pourrait être confisqué par les autorités. L’article 12 rendait la publication ou l’impression ainsi que la distribution de matériel favorable au communisme, de toutes les sortes, illégale. L’article 13 stipulait que la violation de l’article 12 entraînait un emprisonnement d’au moins trois mois et d’au plus douze mois. 

Après une consultation du paragraphe 27 de l’article 91 de La Loi Constitutionnelle de 1867, il est évident que le Parlement fédéral du Canada est exclusivement autorisé à légiférer dans la matière criminelle et que cette autorisation n’est pas conférée aux Assemblées Législatives des provinces. À première vue, il suffit de conclure que toute loi criminelle provinciale ne respecte pas le paragraphe 27. En revanche, le paragraphe 15 de l’article 92 qui énumère les responsabilités d’une province indique, « L’infliction de punitions par voie d’amende, pénalité ou emprisonnement, dans le but de faire exécuter toute loi de la province décrétée au sujet des matières tombant dans aucune des catégories de sujets énumérés dans le présent article ». Pour clarifier le paragraphe 15, une province a le droit de créer une loi qui emporte une incarcération si cette loi est reliée aux compétences de la province. Cependant le droit de créer des lois qui punissent la diffusion du communisme ne figure aucunement dans la liste des champs de compétence de nature provinciale. Conséquemment, une loi qui entraîne un emprisonnement dans un domaine qui n’est pas un domaine provincial est en dehors de la compétence provinciale ce qui est ultra vires

Dans Switzman c. Elbling, la Cour Suprême du Canada, lors d’un jugement de huit contre un, a prononcé la Loi du Cadenas une loi ultra vires et que cette loi devrait arrêter d’être en vigueur. Seulement M. le Juge Robert Taschereau a trouvé que la loi était au-dedans de la compétence provinciale ce qui est intra vires. M. le Juge Taschereau croyait que la Loi du Cadenas garantissait l’ordre dans les propriétés de la Province de Québec. Cependant M. le Juge Taschereau a négligé de mentionner que l’article 13 de ladite loi garantissait l’emprisonnement d’un individu qui violait l’article 12. Comme M. le Juge-en-Chef Kerwin l’a dit « Lorsqu’une loi touche à la matière criminelle, la conclusion que la loi est inconstitutionnelle est inévitable ». Le savant juge, M. le Juge Ivan Rand, un des juristes les plus importants dans l’histoire du Canada et le défendeur le plus ardent des libertés de la personne, a stipulé « Le fait constitutionnel est que l’expression politique et sa communication par la pensée et par la langue est la première condition de la vie sociale. La liberté est aussi importante à l’existence de l’esprit d’un individu que l’est la respiration à l’existence physique d’un individu ».

La décision de la Cour Suprême du Canada dans Switzman c. Elbling a amené la mort à la Loi du Cadenas, l’outil le plus important du régime Duplessis dans l’oppression de la dissidence politique. La Loi du Cadenas, avec l’absence d’une définition du mot « communiste », permettait Duplessis d’attribuer l’étiquette communiste à tous ses ennemis. Suite à cette étiquette, un individu perdrait l’accès à sa maison et il pourrait se faire emprisonner pendant plusieurs mois.

 La Cour Suprême du Canada dans l’arrêt Switzman c. Elbling, a prononcé la Loi du Cadenas, en sa totalité ou in toto, comme étant une loi ultra vires. Le jugement de la Cour Suprême a inspiré le futur premier-ministre John Diefenbaker lors de la création de la Déclaration canadienne des droits de 1960. Cette déclaration a présenté plusieurs droits fondamentaux tel le droit à la liberté d’expression, le droit de pratiquer une religion quelconque, le droit à l’assemblée et à l’association libre et le droit d’avoir et de bénéficier d’une propriété. De plus, ladite déclaration a donné plusieurs droits légaux aux Canadiens. Le droit d’avoir un avocat lors d’une arrestation a été ajouté lors de cette déclaration. La Déclaration canadienne des droits de 1960, malgré son importance, n’était pas utilisée autant qu’il faudrait. Plus tard, cette déclaration a servi comme modèle de base lors de la création de la Charte des Droits et des Libertés de 1982 qui a conféré une protection constitutionnelle aux droits des Canadiens. Évidemment, la Cour Suprême du Canada a démontré son importance lors de l’affaire Switzman, une importance qui a réaffirmé aux Canadiens qu’ils ont le droit à l’expression politique.

Par Mario Michas

 

About The Author
newspaper

Related posts

Leave a Comment